Economie et agent-based modeling

C.H.

Excellent billet de Rajiv Sethi (par ailleurs auteur de très nombreux articles sur l’émergence des normes et des institutions, notamment celui-là sur l’émergence de la monnaie) sur l’intérêt et les limites de l’agent-based modeling en économie. Sethi restitue en fait le contenu d’un article récemment paru dans Nature. Je vous laisse lire le contenu du billet qui me semble plutôt bien équilibré dans son jugement, y compris sur ce qui reste le plus gros problème de cette forme de modélisation aujourd’hui : l’évaluation de sa validité. L’article de Nature souligne aussi les difficultés liées à la complexité même de ce type de modélisation qui nécessite souvent de réunir des compétences très diverses et typiquement interdisciplinaires.

Sur le problème de l’évaluation des agent-based models, je suggère la lecture de cet article écrit à 8 mains par Robert Axelrod, Robert Axtell, Joshua Epstein et Michael Cohen qui propose une méthodologie d’évaluation des résultats à partir d’une démarche comparative et « d’alignement ». Je ne suis pas assez au fait de la littérature pour savoir si la méthodologie proposée par les auteurs est effectivement mise en oeuvre mais elle reste intéressante. Quoiqu’il en soit, il s’agit d’un outil complémentaire (et pas concurrent) aux modélisations plus analytiques qui, comme je l’ai déjà raconté ici, à permis dans d’autres sciences de réhabiliter au moins partiellement certaines théories (théorie de la sélection par le groupe en biologie évolutionnaire). Il n’y a aucune raison de penser que cela devrait être différent en économie.

Cela est d’autant plus vrai si l’on considère que l’économie s’est constituée dès les débuts de son histoire moderne (1776 avec Adam Smith) comme une science de la complexité où « l’ordre » (comprendre : les institutions économiques) est un résultat émergent d’interactions individuelles. C’est vrai bien sûr chez Smith (même si sa pensée ne se réduit pas à ça, on est bien d’accord), chez Menger mais aussi chez le grand opposant de ce dernier, Gustav Schmoller. L’idée de complexité est évidemment également centrale chez Schelling (un petit exemple ici). Les développements contemporains autour de la théorie des jeux évolutionnaires ont contribué à redynamiser cette tradition, bien qu’elle relève d’une approche méthodologique assez différente de l’agent-based modeling. D’ailleurs, pour comparer les résultats que donnent des modèles de jeux évolutionnaires stricto sensu (à base d’équations de réplication dynamique) et des modèles à agents multiples, on peut lire ce très intéressant ouvrage (je l’ai à peine commencé) de J. McKenzie Alexander. Plus généralement, sur l’histoire des explications en termes de « main invisible » en économie, on peut lire ce bouquin de Emrah Aydinonat, lequel a d’ailleurs un blog.

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