Y’a-t-il une culture du blog économique ?

Felix Salmon propose dix raisons pouvant expliquer pourquoi les « econo-blogs » sont très peu nombreux en Allemagne. Pour ma part, je trouve ces raisons un peu trop « culturalistes » mais pourquoi pas. En France, les blogs d’économie ont encore un peu de mal à décoller, notamment quand on regarde le nombre d’économistes universitaires qui ont leur blog (j’en dénombre cinq : O. Bouba-Olga, Etienne Wasmer, Gizmo, Philippe Moati et Bernard Maris). Il faut aussi ajouter certains blogs sur Alternatives économiques (Jean Gadrey et Gilles Raveaud notamment). Allez, disons qu’à la louche il y a environ une dizaine de blogs tenus par des économistes universitaires pour plus de 60 millions d’habitants. Aux Etats-Unis, je n’ai pas de chiffres précis mais le rapport doit être de largement plus de 100 pour 300 millions. Il y a donc encore de la marge. De mon point de vue d’insider, il me semble que les econo-blogs sont encore peu connus et reconnus par la communauté universitaire des économistes. Pour quelles raisons ?

p.s. : j’espère que ceux qui ont passé hier l’épreuve d’économie de l’agrégation d’économie-gestion ont été des lecteurs assidus de blogs du genre Environmental Economics ou Common tragedies. Avec un sujet comme « Economie de marché et gestion des ressources naturelles », c’était du tout cuit…

10 Commentaires

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10 réponses à “Y’a-t-il une culture du blog économique ?

  1. isaac

    Je pense que le blog économique pâtit essentiellement de la mauvaise image des blogs en général. Si un des grands bienfaits d’internet est la désacralisation de l’écrit, ceci ne s’applique qu’à internet lui-même. Tout ce qui provient de la toile est souvent considéré comme peu fiable (et statistiquement cette croyance se justifie sûrement compte tenu de la moindre importance des barrière à l’entrée). Mais sous prétexte que « plus de jeu entraine automatiquement plus de déchets » (pour reprendre la parabole sportive) il n’est que peu pertinent de déduire une absence total de qualité.

    Le revirement ne peut-il pas venir de l’HPE qui, dans le cadre de la « thin history of economic though » (ou de la « contextual analyse » / « historical narrative » pour reprendre l’article de Marcuzzo dont vous faisiez récemment le promotion), va être obligé de se pencher sur les blogs de la même manière que l’on regarde aujourd’hui avec intérêt les manuscrits non publiés ou les courriers des grands économistes. Le blog à l’intérêt de révéler avec une certaine précision (en fonction de la fréquence de publication) l’évolution fine de la pensée d’un auteur, comme un file conducteur entre deux articles publiés. Donc CH, vous êtes un bon sujet d’HPE!

    Il serait intéressent de voir si des « HPistes » se sont penchés sur la question .

  2. arcop

    Base-rate fallacy???
    Juste une question, a-t-on de bonnes raisons de penser que le ratio population/nombre d’economistes est le meme dans les deux pays ? Quelque chose me dit que non… Auquel cas, on devrait plutot avoir un ratio nb de blogs/nb d’economistes (universitaires)

  3. Thomas

    Pour l’anecdote, un jour je passe au GREQAM et il y avait plusieurs profs qui discutaient autour d’un ordi ouvert sur votre blog. Un ami doctorant qui vous suit quotidiennement leur avait fait voir le papier de M Kirman que vous aviez passé en lien.
    J’ai trouvé ça marrant qu’on vous lise au labo (un peu plus et ils tombaient sur mes commentaires!!!).

    Malheureusement je ne crois pas que mes profs se soient mis aux blogs après ça.

    Deuxième anecdote ; M Kirman ne savait pas que le papier qu’il avait remis à l’AFSE sur l’enseignement de l’économie en France avait été publié sur le net. C’est moi qui lui ait appris.

    Tout ça pour dire que les blogs et les universitaires…

    Sinon assez d’accord avec isaac sur sa vision de l’HPE de ce début de 21ème siècle à laquelle on peut ajouter l’histoire des faits économiques qui sera d’une grande précision.

  4. jl

    Franchement, encore un article ennuyeux et inintéressant. Vous allez encore répondre que vous en fichez. Si vous vous prédestinez à une carrière dans l’enseignement, je vous garanti que je ne serai pas le dernier à vous critiquer. Vu que vous semblez mal supporter la critique, je prédis que votre carrière dans l’enseignement et la recherche – vu que vous n’arrivez pas à trouver un article de l’Americain economic Review – (merci pour les excuses pathétiques) sera très très courte.

  5. isaac

    @ JL : Encore un billet particulièrement inintéressant. La grand problème des blogs reste, comme je l’ai souligné, la profusion de remarques personnelles non justifiées. Ceci trouve sa source dans l’émergence d’une croyance au sein de la blogosphère : celle que nos petites vie intéressent tout le monde. Si un certain nombre de blogs échappent à ce biais, notamment celui-ci en apportant un éclairage argumenté sur divers sujets, ceci ne semble pas être le cas du commentaire de JL qui se révèle être l’archétype d’un jugement de valeur gratuit parasitant un bien bel outil, celui d’internet.
    Ce biais avait déjà été dénoncé en littérature par Deleuze, la tension entre la petite histoire personnelle et le récit tendant à l’universel (voir son abécédaire).

    Donc, à la question : « De mon point de vue d’insider, il me semble que les econo-blogs sont encore peu connus et reconnus par la communauté universitaire des économistes. Pour quelles raisons ? », nul doute que JL apporte un élément de réponse intéressent.

  6. C.H.

    @jl :
    Sur les 1463 lecteurs que Le Monde a ramené ici hier, j’ai le plaisir de vous annoncer que vous êtes le seul qui se sente obligé d’exprimer rien d’autre que son insignifiante opinion sans apporter par ailleurs d’éléments intéressants. Félicitations ! Sinon, merci de votre sollicitude concernant ma « carrière », ne vous inquiétez pas les choses se passent très bien pour moi…

    @isaac : effectivement, le problème des blogs est celui du « tri ». Mais je crois que c’est plus un a priori qu’une vraie difficulté insurmontable.

    @Thomas : très content de savoir que l’on me lit au GREQAM !

    @arcop : très bonne remarque. J’avoue que je n’ai aucune idée des chiffres concernant le nombre d’économistes en France et aux Etats-Unis. Cela doit pouvoir se trouver toutefois (JL va s’en occuper vu que je suis une grosse chèvre en recherche de documents et d’informations !)

  7. isaac

    Le problème n’est pas tant le tri que la perception par les chercheurs d’un manque de pertinence (je suis d’accord, c’est bien un a priori). En effet, autant celui-ci parait de prime abord facile pour une revue : je m’intéresse à l’économétrie … je sais qu’en piochant dans econometrica ça devrait être pas mal, sachant que cette information m’est donnée par les fameux classements. Pour les Blog c’est une autre histoire, car si un système de classement semble se faire (le fait que les blogs se référencent entre-eux permet de dégager des réseaux de blogs que l’on peu assimiler in fine à des classements) celui-ci est plus difficile d’accès, de prime abord, d’autant plus qu’il n’est pas reconnu par nos pairs (citer un blog dans un article est-il possible?). A quoi bon se documenter si le média que l’on utilise n’intègre qu’un « médiocre » capital culturel. Tout n’est donc qu’un question de convention. Donc, d’une part pénétrer l’univers des blogs demande un apprentissage, d’autre part ce dernier n’est pas récompensé.

    Après la porte de sortie du PB semble venir de multiples nouveautés : revues en ligne, diffusion d’article via les blog (article porteur du bon capital symbolique), livres ayant à leurs origines des blogs et … changement générationnel (mais ça c’est un peu facile…) et bien sur la potentiel utilisation des blog dans les recherches en histoire de la pensée!

  8. Bonsoir,
    Je me permets de revenir car ce thème m’interpelle.
    C’est vrai que l’on peut se demander objectivement si l’offre de blogs dans tous les domaines spécialisés est vraiment en mesure de se développer.
    Sur l’offre « académique », j’ai une mince idée du pourquoi d’une offre assez rare. Primo, je crois qu’il y a inadéquation avec la notion de nécessaire recul et l’image que l’on se fait d’internet. Globalement, le leitmotiv du Web est réactivité et rapidité. Autrement dit il faut écrire et commenter à chaud. Je crois que cela rebute les enseignants qui adoptent plutôt la réaction réfléchie. C’est une des dérives de la toile, si l’on est pas le premier, croit-on, on n’est pas lu. Pourtant il y a la place pour de l’information plus structurée même si elle est plus lente. Si l’offre « académique » parvenait à imposer cette vision et ne se laissait pas imposer celle de l’immédiat, peut-être irait-elle plus volontier.
    En second, vous dîtes avec raison que l’offre internet est un bien public. Autrement dit, gratuit, et peut-être sourcée d’abnégation. Pas de procès d’intention de ma part, mais peut-être que dévoiler la pensée qui pourrait faire l’objet d’une parution ultérieure fait un peu peur?
    Après tout partager un savoir sur un media comme internet aura toujours un petit parfum de volonté de reconnaissance, ne croyez-vous pas?
    Je terminerai juste sur les Etats-Unis, ne voulant pas être trop longue, il y a un élément qui me semble majeur: c’est la langue Anglaise.
    Force est de reconnaître que tenir un blog en Anglais assure aujourd’hui une diffusion plus que conséquente et sans doute bien plus qu’en langue Française. Alors, si l’on en revient à la notion de partage et de reconnaissance, il y aurait là une certaine logique simplement très empirique.

  9. OS

    @jl : « je vous garanti que je ne serai pas le dernier à vous critiquer ». Super.

  10. NV

    Quelques pistes, sur ce sujet qui m’intéresse depuis longtemps…

    – faible incitation à bloguer : les risques associés (dans l’imaginaire) sont plus élevés que les bénéfices (peu tangibles quand on ne pratique pas). Je pensais êtement à une époque que des exemples comme Becker/Posner, Mankiw ou Delong seraient de puissants émulateurs, mettant en valeur les bénéfices, mais il semble que non.

    – logique de statut et d’entre soi du milieu universitaire. Confort du statut et peur de sortir de ce milieu. Etre noté/évalué par ses pairs, c’est déjà désagréable, alors en venir à une discussion ouverte avec n’importe qui (dont on sait qu’il dit n’importe quoi), quelle horreur ?

    – manque de figures d’ampleur qui en viennent au blog comme moyen majeur, suscitant une émulation. Avec tout le respect que je leur dois, OBO, EW ou econoclaste, que je kiffe, ne sont pas les ultra-stars de la recherche.

    – culture du mépris pour la chose médiatique. L’uiniversitaire qui intervient dans l’espace public se corrompt, en quelque sorte. Il est suspecté de chercher la gloire, la flatterie d’ego, plutôt que la justesse de sa recherche. Déclinaison de ce paradigme à l’économie des blogs. Oubli qu’il s’agit essentiellement d’un lieu de liens faibles et peu nombreux, et oubli de la notion de la responsabilité à produire une expertise dans le débat public…

    Des pistes, mais je partage le même constat décevant, ayant été élevé aux blogs écono/pol américains.

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