Le prix du carburant doit-il augmenter ?

C.H.

La ministre Christine Lagarde met en garde les pompistes contre toute hausse de prix du carburant. Elle indique qu’il « ne faut pas que les pompistes s’amusent sous prétexte qu’il y a une perception de rareté, à augmenter les prix » . Perception de rareté peut-être, toujours est-il que cette perception est en train de devenir auto-réalisatrice à en juger par les queues de voitures que l’on voit se multiplier aux stations-services. On peut comprendre la démarche d’une ministre de l’économie qui ne souhaite pas que les difficultés d’un gouvernement face à un mouvement de protestation sociale se traduise par une hausse du prix du carburant sanctionnant toute la population. Cependant, la hausse des prix serait la solution la plus efficiente.

Bien que le mot soit tabou, on se dirige bien vers un état de pénurie de carburant. Une situation de pénurie émerge lorsque l’offre n’est pas capable de suivre la demande, de telle sorte qu’une partie des demandeurs n’est pas satisfaite. Or, que se passe-t-il en temps normal lorsque suite à un choc (choc d’offre en l’occurence) l’offre diminue relativement à la demande ? Les prix augmentent. L’augmentation des prix est précisément ce qui permet d’éviter la pénurie puisqu’alors moins de demandeurs sont disposés à accepter le prix demandé. Evidemment, le résultat est le même à la fin : moins d’automobilistes seront servis en essence. Cependant, la hausse des prix aurait un double avantage : d’une part, elle casserait la prophétie auto-réalisatrice de la croyance en la pénurie d’essence ; d’autre part, elle permettrait une allocation plus efficace du temps et des ressources pour chacun. Faire la queue pendant plus de deux heures à une station service sans avoir la certitude d’avoir du carburant est particulièrement sous-optimal. Si on laissait les prix faire leur travail de transmetteur d’information, cela permettrait à chacun d’adapter son comporttement en limitant les « frictions » sources d’inefficiences.

Evidemment, mon analyse ci-dessus n’est valable que dans le strict cadre de l’efficience. Il y aussi une question d’équité qui se pose ici. En 1986, Daniel Kahneman et ses collègues avaient montré que la plupart des individus considéreraient comme injuste le fait qu’un marchand de pelles augmente ses prix soudainement suite à d’importantes chutes de neige. On peut conjecturer que l’attitude des automobilistes est similaire ici. Ce qu’il serait intéressant de savoir, c’est dans quelle mesure cette « exigence d’équité » peut limiter la hausse des prix du carburant par les pompistes eux-mêmes, nonobstant les menaces de la ministre de l’économie.  

2 Commentaires

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2 réponses à “Le prix du carburant doit-il augmenter ?

  1. Peut être Christine Lagarde devrait-elle retenter son commentaire incitant les gens a prendre leurs vélos. Ça avait bien marché la dernière fois!

  2. « La ministre de l’Economie en appelle à la responsabilité des pompistes sous peine de sanctions.  » : de sanctions de quoi ? en vertu de quoi ? On est devenu un pays communiste ou bien ? C’est dramatique ces effets d’annonce…

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