Prix du pétrole : la spéculation n’y est pour rien

C’est en tout cas le consensus qui semble émerger maintenant dans la blogosphère et la presse économiques. Dernier exemple en date, un article de James Surowiecki. Les politiques de tout bord qui, dans un bel élan de démagogie, pensent avoir trouvé le coupable parfait feraient bien d’en prendre note…

13 Commentaires

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13 réponses à “Prix du pétrole : la spéculation n’y est pour rien

  1. Markss

    J’ai l’impression que Tyler Cowen n’est pas d’accord, mais je n’ai pas exactement compris ses arguments…

  2. Je chicane, mais le terme « n’y est pour rien » me paraît excessif. L’état actuel du débat est qu’il n’y a pas encore vraiment de consensus, et personne ne s’avance à dire que l’effet est moins que « faible ».
    L’article de Surowiecki me paraît assez trompeur en dédouanant complètement les « spéculateurs ».

  3. C.H.

    @Markss : Tyler Cowen a un gros défaut : il n’est pas facile à suivre !

    @Skav : mea culpa, le titre est excessif. Cependant, ce que dit Surowiecki ne s’écarte pas tant que ça il me semble de ce que racontent Paul Krugman ou Mark Thoma de leur côté. En tout cas, je n’ai pas vu ou entendu d’analyses « sérieuses » (i.e. qui aillent au-delà de la seule affirmation « c’est la faute des spéculateurs » ) tendant à montrer que c’est d’abord à cause de la spéculation que les prix montent, ou même qu’elle joue le rôle de facteur causal significatif. A la décharge de Surowiecki, il faut également dire qu’il est journaliste et que la presse (économique et autre) fait plutôt mauvais ménage avec la complexité. D’où la tendance à forcer le trait…

  4. Gu Si Fang

    Voici une liste de liens collectés pour ceux qui veulent lire la totalité du débat :
    P.S. : si quelqu’un sait publier des liens html (propres…) dans les commentaires, je suis preneur!

    2008.06.24 naked capitalism: Are You Sure the Saudis Can’t Pump More Oil?
    http://www.nakedcapitalism.com/2008/06/are-you-sure-saudis-cant-pump-more-oil.html

    2008.06.24 Hell freezes over
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/24/hell-freezes-over/

    2008.06.24 Various notes on speculation
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/24/various-notes-on-speculation/

    2008.06.24 Speculation and Signatures
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/24/speculation-and-signatures/

    2008.06.25 Dangerous populists?
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/25/dangerous-populists/

    2008.06.25 Arnold Kling is exasperating Paul Krugman
    http://www.marginalrevolution.com/marginalrevolution/2008/06/exasperating-pa.html

    2008.06.25 Does anyone know how much oil there is in the world? – By Yves Smith – Slate Magazine
    http://www.slate.com/id/2193825/

    2008.06.25 Confusions about speculation
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/25/confusions-about-speculation/

    2008.06.27 Oil splat
    http://www.marginalrevolution.com/marginalrevolution/2008/06/oil-splat.html

    2008.06.27 Op-Ed Columnist – Paul Krugman – Fuels on the Hill – Op-Ed – NYTimes.com

    2008.06.27 Matters of convenience (very wonkish)
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/27/matters-of-convenience-very-wonkish/

    2008.06.27 Oil and the Future
    http://www.marginalrevolution.com/marginalrevolution/2008/06/oil-and-the-fut.html

    2008.06.27 Oil experts: they’re as bad as economists
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/27/oil-experts-theyre-as-bad-as-economists/

    2008.06.28 Blame Governments, Not Speculators for High Oil Price by Stefan M.I. Karlsson
    http://www.lewrockwell.com/orig6/karlsson9.html

    2008.06.28 Expectations and commodity prices, even more
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/28/expectations-and-commodity-prices-even-more/

    2008.06.29 More on speculation
    http://www.marginalrevolution.com/marginalrevolution/2008/06/more-on-specula.html

    2008.06.29 Stock-flow equilibrium (wonkish and trivial)
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/29/stock-flow-equilibrium-wonkish-and-trivial/

    2008.06.29 Bad arguments against speculative bubbles
    http://krugman.blogs.nytimes.com/2008/06/29/bad-arguments-against-speculative-bubbles/

    2008.06.30 With oil at $140 a barrel, can you still love Julian Simon?
    http://www.marginalrevolution.com/marginalrevolution/2008/06/with-oil-at-140.html

    2008.06.30 naked capitalism: Bush Administration Role in Iraq Oil Deals Confirmed
    http://www.nakedcapitalism.com/2008/06/bush-administration-role-in-iraq-oil.html

    2008.07.01 Oily Speculations: Financial Page: The New Yorker
    http://www.newyorker.com/talk/financial/2008/07/07/080707ta_talk_surowiecki

  5. ajanim

    Pour reprendre un article de Krugman, dont le lien figurait sur le blog il y a une semaine, nous sommes dans une situation de backwardation et non de contango comme l’a proposé Guillermo Calvo. Il semblerait donc que sur la période actuelle, la spéculation n’y soit pour rien. Mais quelle est la durée de cette période?

  6. Pour expliquer l’impression de Tyler Cowen, c’est environ la fin de http://www.econbrowser.com/archives/2008/05/oil_bubble.html , article recommandé.

    En d’autre termes les futurs ont bien un impact sur les prix réels (« spot ») car ils sont utilisés par les « vrais » acteurs pour se couvrir et planifier. Donc prévoir leur consommation ou production. Le prix est bien déterminé par l’offre et la demande au jour le jour, mais ceux-ci dépendent des choix des acheteurs et vendeurs.
    Etant donnée la faible élasticité il est possible que cet effet soit plus que faible.

    Ce lien entre spot et future est bien le problème, et on trouve des gens (par exemple http://hsgac.senate.gov/public/_files/052008Masters.pdf ) pour dire que ce sont les futurs qui mènent la barre (tout en semblant oublier qu’en face d’un long il y a toujours un short).

    Bizarrement les spéculateurs (les vrais, les hedge funds) ont été plutôt short sur le pétrole, et on perdu beaucoup sur la montée des cours. Ce sont les fonds d’index qui y ont gagné. (je cherche des sources crédibles sur ces infos que j’ai croisées plusieurs fois)

  7. Croisé ailleurs : « There is no independent spot price because inventories are too tight at all points of the delivery chain to resist higher futures prices »

    Ce qui ne me convainc toujours pas, le spot a généralement dépassé les futurs cette année

  8. Gu Si Fang

    Par rapport à l’analyse initiale de Krugman, plusieurs idées intéressantes ont été rajoutées au fil de l’eau :

    – Le fait que le cours des futures soit inférieur au spot ne prouve pas que l’on anticipe une baisse des prix, car il faut tenir compte du service que rend un baril de pétrole dans un entrepôt : il est assez facilement vendable (liquide, sans jeu de mot) ce qui a de la valeur en période de forte volatilité des cours (Tyler Cowen et Steve Waldman)

    – La spéculation ne se traduit pas forcément par une augmentation des stocks, car le pétrole sous terre est aussi « stocké » (Tyler Cowen). A mon avis, il ne rend pas le même service qu’un baril dans un entrepôt, mais au moins son stockage est gratuit. En revanche, si on recherche de la liquidité, les barils sont mieux que le pétrole souterrain.

    Ainsi, les deux indices recherchés par Krugman – augmentation des stocks et « contango » – ne sont pas vraiment des « signatures » de la spéculation. Il peut y avoir spéculation sans ces deux phénomènes.

    – Le rôle de la politique monétaire : en période de risque inflationniste, un actif qui conserve une valeur réelle dans le futur peut voir sa demande augmenter, parce qu’il sert de réserve (cf. M.Thoma sur les taux d’intérêt et hausse des prix). Si l’on recherche une réserve de valeur, le stock de pétrole souterrain fait l’affaire.

    – Une hausse des anticipations de prix futurs ne fait pas seulement bouger l’équilibre sur l’O/D de stock, mais peut aussi faire bouger l’O/D de flux (Tyler Cowen)

    A mon avis, la méthode proposée par Krugman pose problème. Il dit : « Supposons qu’il y ait une hausse des prix futurs anticipés, que se passe-t-il? » Or, à partir du moment où une chaîne d’événements est causée uniquement par un changement spontané des préférences des gens, le raisonnement économique ne permet pas de déduire grand-chose. Ca pourrait faire une chouette dissertation en épistémologie 😉

    Notez que pour Krugman, en l’absence de hausse des prix futurs anticipés, on ne pourrait pas affirmer qu’il y a une bulle : « I’m not asking (at least in the latest entry) whether there’s a bubble; I’m asking whether expectations of a higher future price and/or investment in the futures market by institutional investors are pushing up the current price. If the answer is yes, then we can ask whether there’s a bubble — that is, whether the expected future price is unreasonable. »

    La version qui aurait ma préférence est : « Supposons que les banques centrales provoquent une forte expansion monétaire. Que se passerait-il? » Réponse, en gros :
    1) Hausse du prix relatif des biens stockables par rapport aux autres biens et à la monnaie (en raison d’une hausse de la demande de biens stockables comme réserve de valeur).
    2) Sans rentrer dans les détails, bazar dans la production et dans l’équilibre intertemporel. D’où une bulle qui finalement éclate et se termine en récession.
    3) Une fois en récession, double baisse de ces mêmes prix sous l’effet de la baisse de l’activité et de la déflation.
    Si la cause des perturbations actuelles est monétaire, on peut donc s’attendre à une baisse importante du cours du pétrole, mais quand?

  9. flofac

    Pour info, il y a justement un Théma sur la crise financière ce soir sur Arte

  10. Gu Si Fang

    @ floflac : merci pour l’info, voici un petit résumé pour ceux qui ont raté la diffusion.

    1ère partie : au coeur de la crise
    Scoooop! à la 37ème minute, C.Lagarde frappe un grand coup. Encore plus fort, ça y est, DSK va enfin avoir du boulot : un rapport à présenter en octobre sur l’état des réserves, les stocks et le prix du pétrole!!! Bon, soyons clair, cette première partie était nulle.
    http://www.google.fr/search?hl=fr&q=%22voyage+au+coeur+de+la+crise%22&btnG=Rechercher&meta=

    2ème partie : bulles, krachs et rebonds :
    Présenté par Elie Cohen, et beaucoup plus intéressante que la première partie. Bon rappel des épisodes précédents : la crise asiatique de 1997, la faillite de LTCM, la bulle Internet, Enron, 9/11, la baisse des taux de 2002-2004, et les subprimes. Morale : une bulle financière, c’est un jeu collectif, et à la fin on siffle l’arbitre et on change les règles. Mon petit chouchou : C.Noyer à la 48ème minute. Ma grand-mère aurait dit « faux comme un âne qui recule », mais tout cela est très subjectif. Le commentaire le plus sage : Aglietta qui dit, vers la fin « les crises sont suffisamment espacées pour que ça ne soit jamais les mêmes opérateurs qui sont soumis deux fois à ce type de situation ». En d’autres termes, on oublie!
    http://www.google.fr/search?hl=fr&q=%22bulles+krachs+et+rebonds%22&btnG=Rechercher&meta=

    Ouf, je crois que je vais aller me reposer, moi…

  11. Le point du vue opposé :
    http://peakoildebunked.blogspot.com/2008/07/366-futures-prices-determine-physical.html
    Cela me semble être le premier connaisseur du marché pétrolier à défendre de manière claire l’hypothèse spéculation.

    Le sujet me paraît toujours ouvert, je continue à croiser les sources, notamment http://seekingalpha.com/article/78264-commodities-prices-speculation-exposed (mauvais article mais qq connaisseurs dans les commentaires)

  12. Je suis assez étonné que les analyses données par les liens externes n’évoquent pas le facteur géopolitique majeur, à savoir la nouvelle politique moyenne orientale des USA à partir de 2001, les biocarburants me paraissant être l’une des pièces du puzzle.
    La crise Iranienne n’est pas résolue. Voilà un facteur très haussier pour le pétrole.
    Le spot transige plus bas que la livraison future. Voilà encore un signe que le plus haut atteint à 147$ pour le WTI n’est qu’un sommet intermédiaire.
    Bulle financière ? Pour l’affirmer, il faudrait montrer que les fonds longs pétrole soient investis sur des produits à faible risque, ce qui ne peut être le cas puisque les fonds interviennent sur des instruments à effet de levier, alors que dans le cas des bulles immobilières et technologiques, les particuliers pouvaient y participer.
    C’est plutôt l’effet de panique qu’il faut cerner. Les gens achèteront le pétrole à n’importe quel prix par peur de rationnement, les traders sur contrats à terme suivront et se feront gruger car la pénurie est illusoire.

  13. Pingback: Pourquoi le prix du pétrole fait-il le yo-yo ? « Rationalité Limitée

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