Le « target article » du prochain numéro de la revue Behavioral and Brain Sciences est un papier du philosophe Francesco Guala sur la réciprocité en économie et en biologie, et plus particulièrement sur ce que les expériences en laboratoire nous apprennent sur les comportements de réciprocité. Guala distingue deux types de réciprocité : la réciprocité « faible » permet la coopération car elle est basée sur des stratégies peu coûteuses de sanction des « free-riders » ; à l’inverse, la réciprocité forte indique que la coopération est maintenue dans des interactions répétées de manière finie par la propension des agents à sanctionner les déviants, y compris lorsque le fait d’infliger des punitions est très coûteux. Certains travaux expérimentaux (notamment ceux de Bowles, Gintis, Ferh, etc., voir ce bouquin) semblent indiquer que la réciprocité forte est un phénomène largement répandu chez les humains et qu’elle explique de manière significative la coopération. Guala montre que ces résultats expérimentaux ont une validité externe douteuse dans la mesure où on ne dispose pas d’exemple historique de communauté ayant maintenu la coopération à partir d’un système de sanctions impliquant un sacrifice de la part des individus mettant en place les sanctions.
L’intérêt de la revue BBS est que chaque article principal est accompagné d’une vingtaine de commentaires de la part de spécialistes provenant de différentes disciplines. On peut donc y trouver des réponses des défenseurs de la thèse de la réciprocité forte. Difficile de trancher au final, mais il me semble que les éléments avancés par Guala sont quand même convaincants.