C.H.
Comme vous le savez surement déjà, le « prix Nobel d’économie » 2011 a été remis à deux macroéconomistes, Thomas Sargent et Christopher Sims pour, dixit le comité, « leurs recherches empirique sur la causalité en macroéconomie ». Je suis loin d’être le mieux placé pour commenter ce prix, aussi je vous renvoie volontiers vers ce billet chez Mafeco et vers celui d’Alex Tabarrok de Marginal Revolution. Concernant Sargent, je relève toutefois une contribution essentielle à la théorie des anticipations rationnelles (qui n’a pas été récompensé en tant que tel toutefois) avec l’idée que les agents peuvent éventuellement connaître le « bon » modèle de l’économie mais uniquement au terme d’un processus d’apprentissage. On peut alors interpréter les anticipations rationnelles en termes de « self-confirming equilibrium » (SCE) avec une propriété fondamentale : tous les équilibres en anticipations rationnelles sont des SCE, mais tous les SCE ne correspondent pas à des équilibres en anticipations rationnelles. Cela s’explique par le fait que les agents peuvent avoir des croyances fausses concernant les comportements hors du sentier d’équilibre (croyances qu’ils n’ont pas la possibilité de réviser).
Un peu en marge, on peut relever cette intéressante observation de Noah Smith relative à la nature des travaux qui sont récompensés par le « prix Nobel d’économie » :
What people need to understand about the « Economics Nobel » is that it is not a prize for a specific discovery, like the science Nobels (medicine, physics, and chemistry). It is more of a lifetime achievement award, like the Fields Medal in mathematics. The reason this is so is that to get a science Nobel your discovery actually has to be verified empirically, while in economics, convincing empirical verification is extremely rare. So what ends up happening is that « Economics Nobels » are generally given either for A) development of new techniques and methods, or B) theories that tell interesting stories.
Je ne m’étais jamais fait cette réflexion, mais elle me semble assez juste : clairement, le Nobel d’économie récompense la plupart du temps (et même si ce n’est pas toujours explicite dans l’annonce faite par le comité) le ou les lauréats pour l’ensemble de leur contribution plutôt que pour une « découverte » spécifique. C’est a fortiori le cas pour tout ce qui concerne la macroéconomie où, par définition, on a a beaucoup de mal à estimer empiriquement la validité des théories (c’est beaucoup plus relatif en ce qui concerne la microéconomie). Il est finalement assez ironique que le Nobel d’économie soit, sur ce plan, plus proche de l’esprit du Nobel de littérature que de celui du Nobel de médecine ou de physique.
Aucun petit mot introductif pour expliquer en quoi ce « prix nobel » n’en est pas un mais un beau coup de comm’ de la banque de Suède/hold up sur la mémoire d’Alfred Nobel ? C’est dommage, votre usage des guillemets montrant que vous connaissez l’histoire. (Mais, on peut supposer que le public de ce blog est suffisamment informé en économie pour être au courant de cette info)